Instant de Lumière qui éveille même le Soleil! Il s'est, dans un premier temps, offusqué de ce réveil brutal, mais mon sourire derrière les nuages ne pouvait le laisser indifférent : cela faisait des mois qu'il n'en avait eu autant. Il se pare pour revenir sur scène, les nuages s'estompent, ses rayons brillent d'un rire sonore et écarlate. Tout est prêt : rideau.

La Valse depuis peu reprend sans cesse en ma tête, frénétique, impulsive, incontrolable comme une enfant qui n'aurait de cesse de se voir aimée. Elle fait à nouveau le siège de mon coeur et, à ma grande surprise, exhume de leurs cercueils d'amertume et de larmes des couleurs qui m'éblouissent, m'aveuglent, m'ébranlent...

...puis me lâche en plein délire sur ce chemin de lumière que je ne connais que trop en rêve. Le grand bal des couleurs reprend sur un tempo léger et enivrant : le désir à nouveau s'insinue dans les coeurs et je redeviens l'amoureux éventuel du premier cotillon venu. L'étrange marche mécanique qui ternissait mes tons depuis le départ d'A. semble s'estomper. Le Commandeur, sans cesse, convoite mon coeur. Sculpture de marbre et de chair, il me tend une main glacée chaque fois que je tourne le regard vers l'arrière, attendant patiemment son heure pour voler mes couleurs.

C'est un retour de l'Enfer que chantaient les rayons que j'éveillai avant hier matin en quittant Christa. Un retour à la Vie...

Un retour à la Valse...

Elle suit quelques cours avec moi. Elle m'observait et vibrait sur mes accords depuis quelques temps déjà, corde si sensible qu'un souffle - pas même, l'idée d'un souffle- suffisait à extraire d'elle les notes les plus sensuelles de sa palette.

C'est une femme couleur douceur qui possède, sur une scène ou sous un drap, une voix qui ferait jaillir la lumière des les âmes les plus obtuses. Une voix, aux sonorités à la fois troublantes et cristallines; poignantes et divines; sensibles et sybillines, entonnerait un hymne que je voulais celui de nos corps. Chaque entrevue se voulait plus longue que la dernière, chaque regard plus chargé que le précédant et chaque silence de plus en plus sonore...

Secrètement folle de passion, Christa se donne comme un parfum aux plus délicates essences: caressante et envoutante, puis captivante et envahissante. C'est avec la bénédiction du soleil que mon amante s'est offerte à moi sous un arbre dont les branches filtraient les rayons afin d'en faire des confettis de couleurs.. 

Christa porte bien son nom, et les notes qu'elle module à volonté ont la résonnance, l'éclat de la Porte des Cieux. Elle tient à voir, sentir et vivre ce pays qui est le mien. Qu'à cela ne tienne : je ne laisserai donc pas dormir son coeur et l'emmènerai baguenauder sur les berges de l'île du rêve et de l'oubli...

L'oubli est contagieux, je le lui apprendrai.

Car après rires et pleurs, seul reste l'essentiel...

                                                      ...c'est le coeur.