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Voici venir l'heure...
--> ...où s'épanouissent les couleurs

Le soleil s'est réfugié derrière un voile grisatre et ouateux. C'est que je ne suis pas d'humeur, aujourd'hui, à vibrer de toutes mes forces. Je me contenterai de dispenser une lumière diffuse, caressante, et d'azurer le ciel d'une note aux sonorités qui rappellerait les plus doux parfums et les tonalités les plus égayées. Non, le soleil n'est pas de mauvaise humeur : il se repose. Il savoure en pensées; il revit dans sa chair; les douceurs et les notes qui , l'une après l'autre, chacune comme si elle était une vie entière,ponctuèrent ce week-end éclair...

J'écris "éclair" car il fila comme tel, étoile filante refusant de se laisser contempler. Alors qu'il m'aurait plu de gouter mille fois encore les compositions pastelles et printanières que m'offrirent les 72 dèrnières heures, le Temps poursuivait sa marche à sa propre cadence qui n'est jamais la mienne! Son tempo est toujours ou trop rapide ou trop lent. Je hais le Temps et sa traversée vers le néant. C'est le vaisseau du Commandeur, chacun de ses pas est le martèlement qu'il inflige à nos mémoires. Mais la mienne n'en a cure, animal sauvage, bondissant et sautillant, échappant à la pesanteur de sa marche par la grace de la légèreté que lui confèrent les couleurs. Elle est affranchie de cet hideux purgatoire et, aussi insaisissable qu'un nuage, ne se laisse pas imprégnée : ma mémoire se moque de tout et ne retient rien. C'est là l'un des privilèges de l'Eternité : chaque nouvelle aurore me bénit d'une nouvelle naissance. Ainsi, la pluie d'aujourd'hui demain sera oubliée, les peines de coeur s'en vont se poser ailleurs et les corps et les formes se mêlent puis s'effacent. Seules restent les couleurs, dépot de lumière tapi dans un recoin de l'esprit. La malédiction veut seulement que je sois assujetti aux souvenirs...  Pas ceux qui vous caressent le coeur, faisant rejaillir dse instants aux teintes appaisantes ou douloureuses alors que l'on se retrouve face à un cadeau-souvenir. Il s'agit de ces souvenirs qui vous assaillent, vous agressent. Ils se jettent sur le coeur - loups impalpables aux crocs pourtant si acérés - puis, au travers des yeux qu'ils ensorcellent, soumettent l'esprit. Ces souvenirs surgissent à tout instant, incompréhensibles et incontrolable, se situant dans un passé dont je ne puis me rappeler... Si je caresse la brune dans les bras de la blonde, si je me noie dans le regard bleu de mon amante pour retrouver le gout fruité d'un sourire émeraude, ce n'est guère volontaire.

Je déjeunais avec Kay ce midi. Kimberlay, que j'ai rebaptisée Kay lors de nos moments en duo, est une délicieuse asiatique aux cheveux noir-luxure-et-volupté et dont les yeux semblent retenir la plus mystérieuse des nuits-sans-lune.

Bien que j'ai toujours abhorré ce type de contacts, force m'est de reconnaitre que c'est grace à MSN que je puis ébaucher les premiers pas de ma valse avec elle. Nous travaillons ensemble et avons tous les emails de la boite. Je l'avais déjà maintes fois observée. Je connaissais son regard pour m'y etre plusieurs fois jeté et je savais qu'elle avait à plusieurs reprises fait l'erreur de tenter de lire le mien. C'est souvent là qu'est l'instant fatal où, éblouies ou intriguées, effrayées ou repoussées, les femmes entrent dans la danse. Les notes que j'y distille ne peuvent laisser indifférent. Toutefois, le nombre impressionnant de collègues masculins lui tournant autour ne me permettait que rarement d'être seul avec elle.

Un jour où nous nous étions croisés entre deux ascenceurs et que les couleurs que j'avais vu sur son visage avaient accéléré le rythme de mon coeur, je lui fis parvenir ce petit mot par MSN : "Voici venir l'heure où vibrant sur sa tige...". Il s'agit du début d'"Harmonie du soir", un poème de Baudelaire que j'aime particulièrment. Je savais qu'elle avait étudié la poésie pour l'avoir entendu lors d'une conversation collégiale. J'osais espérer qu'elle y serait sensible...

"Chaque fleur s'évapore ainsi qu'un encensoir..." fur sa réponse (c'est la suite!). Je lui envoyai le vers suivant et nous continuames jusqu'à la fin du poème sans jamais nous en écarter. Ce jeu se répéta durant des semaines entières, mais j'ai la ténacité d'un missionaire : je refusai de laisser pareille créature dans l'ignorance de la véritable couleur de Dieu. Le jeu tourna au marivaudage : nous parlions d'elle, du ciel et du soleil. Ce n'est que vendredi qu'il prit une nouvelle teinte.

Nous discutions de ses souvenirs d'enfance - je l'écoutai, n'en ayant aucun - lorsqu'à la suite du récit d'une situation embarrassante de sa jeunesse elle voulut m'imposer le secret. Je lui répondis aussitot qu'il lui faudra sceller mes lèvres elle-même. J'avais la possibilité de la voir depuis mon bureau et attendis sa réaction. Ce furent 30 secondes qui durèrent une éternité et je maudissais le Commandeur de m'infliger pareil supplice. Quand bien même, je saurai me venger de lui! Enfin, elle leva la tête et ses yeux tombèrent dans les miens. La symphonie qui m'hypnotisait à ce moment-là avait la sonorité poignante d'un soleil d'automne, rouge-feu et captivant; rouge coeur et ennivrant; rouge désir et excitant. La transformation intervenue dans ses yeux, l'apparition de cette touche de couleur qui fait danser les pupilles, je ne la connais que trop. Je ne connais que trop ce reflet, effacé et plein de doutes encore, pour ne pas le reconnaitre avant qu'elle ne sourie et que je ne lise sa réponse : c'est le mien. "Rejoinds-moi devant l'ascenseur" avait-elle répondu...

Je l'y retrouvai, toujours aussi désirable et toujours aussi belle, et nous n'attendimes même pas que l'ascenseur se referme sur nous pour sceller notre secret d'un baiser langoureux aux gouts gouts de fuits rouges, fraises ou cerises. Un long baiser d'amant, intense comme les abysses qui mènent à l'Enfer, un baiser qui fit chanter la Lumière...

Mais Kay a "quelqu'un" dans sa vie et il nous fut impossible de trouver un moment à partager en alcôve elle et moi avant lundi soir. Rendez vous était pris... Nous nous séparames en fin de journée avec le désir d'elle qui me torturait. Nos collègues jacassaient autour de nous alors que nous aurions mis le monde à feu et à sang pour une brève Eternité.

Je passai la soirée de vendredi empli de son image. Je déclinai sa palette sur ma toile intime, associant chacune de ses teintes à des moments que j'imaginais vivre avec elle. Une série d'envols plus vertigineux les uns que les autres. C'est en allant boire un verre en pensant à Kay que je la rencontrai...

Elle s'appelle Eve, est tchèque, blonde et d'une beauté aux reflets slaves. Eve aime comme on rit, comme on pleure comme on jouit : spontanément et sans retenue. Elle retrournait à Prague lundi matin et m'assurait qu'un week-end de séminaire nécessitait une amourette avant le départ. Son parfum m'en rappelait un autre, dont les couleurs m'ont échappé. Alors je l'ai embrassée pour ravoir sur les lèvres le gout de Kay. Mais mes souvenirs sont capricieux : c'est Assia que j'ai retrouvée lorsque, après notre baiser, elle m'exposa les deux perles émeraudes que'elle cachait sous ses paupières. Assia, ma douce Assia... Elle aussi était slave et blonde. Nous désirions convoler mais je quittai Prague quelques temps plus tard... sans elle, c'est tout ce dont je me souviens. Je retrouvai, combien de siècles plus tard, sa couleur en ma mémoire. Je l'avais aimée avec fureur et quitter avec la mort dans l'âme.

Je passai le week-end entier avec Eve, quittant rarement le lit, encore moins la chambre d'hotel. J'eus le bonheur de découvrir Eve sous différentes facettes, sous différentes couleurs : pêche-extase, violet-intensité; rose-rêveur et noir-illusion. Avant de me quitter, lundi matin, elle m'a transmis ses coordonnées en m'invitant à la rejoindre en debut de semaine prochaine. Juste avant qu'elle ne parte, je retrouvai A. par l'entremise d'un soupir dont elle avait le secret et qu'elle poussait de manière semblable. C'est un soupir qui a la teinte de ces espoirs que l'on n'ose concevoir de crainte d'avoir à les pleurer. Son dernier baiser me décida. Je sais que j'irai la voir. Une autre m'eut peut-être indifférée si elle avait été polonaise ou russe. C'est le souvenir d'Assia et le soupir d'A. qui me pousseront là bas, condamné que je suis à refaire sans cesse mon parcours.

Kay ne fut jamais aussi délicieuse que ce matin à notre réveil. Lorsque nous nous vimes lundi, son sourire et la caresse qui accompagnèrent son "bonjour" promettaient une rédition. Nous attendimes midi pour s'emparer l'un de l'autre avec la volonté de buriner cette ôde à la Lumière sous réserve de le polir ultérieurement.

Nous ne tinmes pas 1/4 d'heure avant de rejoindre mon appartement et de célébrer notre départ pour l'Eternité, voyage aux confins de soi-même, mystérieuse valse dont on ne sort jamais identique.

C'est elle qui rythme ma vie en échange des couleurs...

                                                ...qui animent mon coeur.

Ecrit par L'Homme de Couleurs, le Mardi 9 Mai 2006, 02:01 dans la rubrique Couleurs désirs ( Don Juan en couleurs).

Commentaires :

Maylis
09-05-06 à 02:40

don juan en couleurs

je crois que c'est la première fois en lisant votre article du soir que je prends réellement conscience de ce que peut-étre ces valses ininterompues de maitresses belles cosmopolites et insolites qui hantent vos songes vos nuits votre lit vos souvenirs et votre quotidien...cette soif des corps et des désirs de tant de femmes qui se juxtaposent m'a donnée le tournis, pour moi la sage Maylis c'est un peu trop. Bises à vous Dorian et à bientôt...

 
Dorian
09-05-06 à 02:57

Re: don juan en couleurs

Ma douce May serait-elle effrayée?

Il ne tient pourtant qu'à vous de vous rassurer : je ne suis qu'un enfant qui n'avait ni renard à apprivoiser, ni mouton qu'on lui aurait dessiné... May est bien trop sage pour ne pas lire entre les silences de mon histoire, mais May n'est pas assez sage pour ne pas vouloir savoir. Ma tendre May s'effraie de me voir si coloré?

Le reste est silence et couleurs...

                                            ...n'aies pas peur.


 
alex
11-05-06 à 15:49

Re: Re: don juan en couleurs

Cher Dorian votre pseudo et vos histoires me font penser à ce livre que j'ai lu il ya bien longtemps...
'Le portrait de Dorian  Gray (oscar wilde).
J'aime les couleurs de vos histoires, et celles que vous donnez à vos maitresses.




 
Dorian
13-05-06 à 22:21

Re: Re: Re: don juan en couleurs

Si vous aimez mes couleurs, c'est - je le pense sincèrement - parce qu'elles proviennent - de même que les vôtres - du coeur.

Merci pour votre passage par ici, génie de la bouteille.

Revenez souvent partager mots et merveilles.